Comment est né un tel engagement ?
Comme pour beaucoup, il y a eu le Bataclan. Puis le déclic, grâce à ma sœur. Un soir, en Allemagne, un homme lui demande un peu d’argent pour se payer un repas. Il est Syrien et a fui la guerre avec sa femme. Il était médecin, elle, ingénieure. Ce soir-là, on leur a servi de la soupe avec du porc. Comment ce fait-il que dans un pays européen, on ne puisse pas offrir un menu décent à ces hommes et ces femmes ? Même dans les pays les plus pauvres, on sert un repas adapté à l’étranger. J’ai cogité pendant 3 jours et 3 nuits, en me demandant comment je pouvais agir, aider. Et je me suis dit : s’il y a bien une chose que je peux faire, c’est cuisiner justement.
Le récho est une aventure collective ? Un engagement très féminin ?
J’ai appelé une amie, Elodie Hué (co-fondatrice et chef cuisinière professionnel). Je lui ai dit, si tu es partante, on le fait. Et voilà comment nous nous sommes lancées. Neuf amies se sont engagées à nos côtés (elles sont passionnées de cuisine). Tout est ensuite allé très vite. Statut de l’association, mise en place d’un crowdfunding, passage par la Commission Européenne… J’ai arrêté mon travail pour me consacrer pleinement au food truck. En août, après seulement 4 mois de discussions et de démarches, nous sommes arrivées sur le camp de La Linière à Grande-Synthe (dans le Nord).
Quelles sont les principales actions du Récho ?
Nous distribuons des repas et proposons des ateliers de cuisine entre bénévoles, populations locales et réfugiés. Nous avons lancé “Le Récho” avec deux envies précises. Premièrement, avec celle de réparer, de consoler en passant par l’assiette. Mais aussi, avec l’envie de créer du lien, de l’échange, et surtout d’apprendre des réfugiés. La cuisine est un langage universel, qui permet de dépasser la barrière de la langue. Elle crée du lien social, redonne du dynamisme et de la confiance en soi. Sur le camp, nous avons distribué en moyenne 500 repas par jours. 150 repas végétariens et 350 repas créés via les ateliers, et ce, en présence notamment de chefs étoilés tels qu'Akrame Benallal et Florent Ladeyn.
Comment avez-vous vécu cette première mission ?
Nous sommes revenues en septembre, après avoir pris une grande claque. Tout le monde à des a priori ou des préjugés. Mais, il ne faut pas faire de généralité, à toutes les échelles (politique, façon de vivre ou autres). Au cours de notre parcours, nous avons rencontré tellement de gens généreux et engagés. Une fabuleuse chaîne de solidarité s’est mise en place : locaux et réfugiés ont, ensemble, mis la main à la pâte et partagé des recettes et des moments aussi savoureux qu’inoubliables. Cette mission aurait été impossible à accomplir sans l’incroyable soutien des 60 bénévoles et d’associations telles qu'Utopia 56, EMMAUS ou encore Salam.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Nous allons retourner à Grande-Synthe en mars avec des fonctionnaires de la Commission Européenne. En avril, nous allons à Arras pour cuisiner avec des réfugiés pour ensuite distribuer les repas à des SDF. Puis, nous prendrons la direction de la Belgique et « le Récho » sera itinérant en Europe. Nous souhaitons être nomades. L’objectif : établir un état des lieux européens de l’accueil des réfugiés.
Face à cette situation d’urgence, qu’est-ce qui vous rend plus forte ?
Voir qu’on n'est pas seule. La France à un autre visage que ce qu’on veut bien nous montrer. La Solidarité est présente partout et il faut faire de cette envie d’agir quelque chose, la transformer en une pulsion de vie.
Pour faire un don à l’association rendez-vous sur le site www.helloasso.com et retrouvez « Le Récho » sur Facebook et Instagram pour suivre leurs dernières actualités. Plus d’infos sur lerecho.com